Vacances, injonction au repos : quand la performance s’invite même dans le lâcher-prise

30/07/2025

Vacances sous pression : le paradoxe moderne du repos


Travailler onze mois pour mériter deux ou trois semaines de vacances. Voilà ce que beaucoup vivent sans trop le remettre en question. Et pourtant, quelque chose ne tourne pas rond à mon sens.

C'est un peu comme si tu mangeais tout ce que tu peux pendant quatre jours, puis que tu t'affamais le reste du mois. Absurde, non ? Et pourtant, c'est exactement ce que font beaucoup (trop) de personnes avec leur énergie, leur système nerveux, et leur besoin vital de repos. On " tient bon " pendant 11 mois, en espérant que deux semaines suffiront à tout réparer.

Mais ton corps, ton esprit et ton cœur ont besoin de respirer tous les jours. Ces quelques jours censés nous reposer, nous recentrer, nous recharger, se transforment parfois en une source d'angoisse diffuse : Est-ce que je profite assez ? Suis-je en train de bien me reposer ? Est-ce que je fais assez d'activités ? Est-ce que je rentabilise mes vacances ?

Nombreux.ses sont ceux qui reviennent de congés plus fatigués, plus nerveux, plus vides... qu'en partant. Ce paradoxe, ce malaise, mérite qu'on s'y arrête.

Une société qui transforme le repos en obligation


Notre société, du moins en occident, valorise l'action, la rapidité, la productivité. Et ce modèle ne s'éteint pas en dehors du travail. Il s'infiltre dans nos loisirs, nos relations, nos vacances. 

Le repos n'est pas un événement exceptionnel : c'est un besoin vital, qui a besoin d'espace chaque jour.

Le message, inconscient ou non, est implicite mais puissant : Tu dois faire quelque chose de ton temps. Même quand tu es censé.e ne rien faire. Vous voyez le paradoxe et la pression constante que beaucoup s'inflige au quotidien, non stop ? Nous avons intégré cette croyance toxique : le repos est utile uniquement s'il est efficace. Il doit porter ses fruits : te rendre plus énergique, plus créatif.ve, plus performant.e… à ton retour. 

Le repos n'est pas une "récompense performante", mais un besoin vital. Le processus est inversé et incompris : on doit se reposer suffisamment pour FAIRE et ÊTRE.

Mais alors, où est l'espace pour juste être ? Pour se relâcher sans intention ? Pour se reconnecter à soi sans se surveiller ?

D'un point de vue thérapeutique : ce qui se joue derrière


Quand un.e client.e me parle de ses vacances "ratées", je creuse souvent ce qui se cache derrière. Et ce que je retrouve souvent, ce sont des mécanismes d'auto-pression profondément ancrés.

1. La peur de l'ennui

Une peur irrationnelle ancré dans notre société d'occident : l'ennui est un cadeau. Il est signe de repos, de rien, d'un espace ou la créativité et les idées émergent parfois. Certaines personnes associent le vide à l'inconfort. Elles ont peur de se retrouver face à elles-mêmes. Je comprends, ça peut-être déstabilisant et nous bousculer de se retrouver face à ce rien. En réalité, ce besoin constant de stimulation est souvent le symptôme d'un stress chronique, voire d'un fond anxieux.

2. Le besoin de contrôle

Planifier chaque jour, prévoir chaque activité, chercher l'optimisation. Cela peut cacher une difficulté à lâcher prise, à s'abandonner au temps présent.

3. La culpabilité du non-faire

Ne pas "faire" peut réveiller une honte intériorisée : "je suis inutile", "je ne mérite pas ce temps pour moi". Ces schémas sont souvent hérités de l'enfance ou d'une culture familiale valorisant l'effort, le devoir, l'effacement de soi.

4. L'impossibilité à écouter ses vrais besoins

Quand on est habitué·e à fonctionner en mode pilote automatique, on ne sait plus ce qui nous ressource réellement. On fait ce que les autres font. On suit un modèle extérieur. Mais nos besoins sont plus subtils. Et le repos, pour être réparateur, doit venir répondre à un besoin intérieur, pas à une injonction extérieure.

Les signaux d'un "repos" qui n'en est pas un


Voici quelques signes fréquents que tu vis tes vacances dans un schéma de performance plutôt que de régénération :

  • te sentir obligé.e de remplir tes journées

  • culpabiliser quand tu ne fais "rien"

  • ressentir un vide intérieur dès que l'agitation retombe

  • comparer tes vacances à celles des autres

  • anticiper déjà la reprise avec angoisse

  • revenir fatigué.e, irritable, ou encore plus stressé.e

Et si on réapprenait à se reposer vraiment ?


Se reposer, ce n'est pas fuir, consommer ou optimiser. C'est se relier à soi. C'est redescendre, enfin, d'un fonctionnement de survie. C'est habiter son corps, revenir à ses sensations, retrouver son rythme.

Voici quelques pistes thérapeutiques et concrètes pour faire de tes vacances un espace de reconstruction intérieure.

 1. Redéfinir le repos : de la performance à la présence

Ce que le repos n'est pas :

  • Un résultat à atteindre

  • Une pause entre deux efforts

  • Une activité planifiée

Ce que le repos peut devenir :

  • Une expérience sensorielle (respirer, écouter, goûter)

  • Un espace mental (ne rien décider, ne rien produire)

  • Une permission (se dire : "je n'ai rien à prouver")

Exercice : chaque matin, pose-toi cette question simple : "Qu'est-ce qui me ferait du bien aujourd'hui, sans attente de résultat ?"

2. Revenir au corps : sortir de la tête

Notre mental adore planifier, analyser, projeter. Mais le corps, lui, connaît un autre langage : celui du rythme, du calme, de la lenteur. Prends le temps de te reconnecter à tes sensations - rien de compliqué, de la simplicité, des vacances quotidiennes de quelques minutes : 

  • Étire-toi longuement

  • Marche pieds nus

  • Nage en silence

  • Observe la nature, sans rien faire d'autre

  • Respire profondément en conscience

  • Bois une boisson chaude (ou fraîche !) sur une terrasse et poses ton regard sur ce qui t'entoure

  • marche dans la mer en écoutant le bruit des vagues

Petit rituel de pause corporelle (plus tu le feras et plus tu apprécieras ce rituel qui s'ancrera naturellement dans ton quotidien - simple et efficace) : 3 fois par jour, arrête-toi 1 minute. Ferme les yeux. Sens ton souffle. Laisse ton ventre se relâcher. C'est un "mini-reset" pour ton système nerveux. On a tendance à respirer du haut du corps quand on est en mode speed / performance / contrôle. Inspire en gonflant ton ventre et expire doucement en le dégonflant, recentrer sa respiration et y prêter attention, est et restera toujours l'outil le plus simple et le plus efficace pour revenir à l'instant présent et ralentir son rythme. 

Petit outil personnel que j'ai transmis à mon fils et qu'il fait chaque soir avant de se coucher : s’asseoir confortablement sur son lit, fermer les yeux, poser ses deux mains sur son cœur et simplement le sentir battre - c'est magique et si apaisant ! 

3. Désamorcer la pression numérique

Les réseaux sociaux sont devenus des vitrines de performance permanente. Même en vacances, on se compare, on se met en scène, on cherche l'image parfaite. Pose-toi cette question en y répondant honnêtement  : Est-ce que je fais cette activité pour moi… ou pour la montrer ?

Conseil : désinstalle temporairement tes réseaux sociaux ou désactive leurs notifications pendant quelques jours. Observe ce que cela réveille en toi : manque, vide, liberté, inconfort ? C'est un miroir précieux de ton rapport au contrôle, à la stimulation et à l'image. 

Autorise-toi des moments de vraie déconnexion. Par exemple, choisis un jour dans la semaine — le dimanche, peut-être — pour ne pas consulter tes réseaux. Offre-toi ce temps suspendu, coupé du tumulte extérieur, simplement pour être là, ici, avec toi-même.

4. Écrire pour déposer

Tenir un carnet durant les vacances peut t'aider à :

  • Te reconnecter à ce que tu ressens

  • Te libérer du brouhaha mental

  • Observer ton évolution

Tu n'as pas besoin d'écrire parfaitement bien. Juste de te parler à toi-même avec bienveillance.

Proposition d'écriture : Aujourd'hui, je me sens… J'aimerais m'autoriser à… Je remarque que… Et si je lâchais…

Vers une autre relation au temps et au repos


Ce que révèle tout cela, c'est qu'il ne suffit pas de s'arrêter pour se reposer. Il faut aussi désapprendre.

Désapprendre à s'auto-surveiller.
Désapprendre à mériter.
Désapprendre à prouver, produire, performer.

Ce que tu vis en vacances est souvent un miroir de ta relation au temps, au vide, à toi-même. Et parfois, ce miroir est inconfortable… mais profondément transformateur.

Tu n'as pas besoin de réussir tes vacances. Tu peux simplement t'autoriser à être, respirer, sentir, ralentir.

Et peut-être, de là, naîtra une nouvelle façon de vivre ton quotidien aussi.

En conclusion : oser un autre rapport au repos


Et si tu n'attendais plus les vacances pour vivre ? Et si, chaque semaine, tu créais des poches de lenteur, de silence, de douceur, sans attendre de les "mériter" ?

Le véritable repos commence quand tu arrêtes de vouloir être efficace. Et dans ce relâchement, tu retrouves enfin ta vraie énergie, celle qui n'a pas besoin de prouver, juste de vivre.


Betty, votre thérapeute.

Qui je suis ?Comment puis-je vous aider ?Rédaction thérapeutiqueHoraires et contact

Mes autres articles : Articles - graines de réflexion

Créez votre site web gratuitement !